Chez les francophones d'Amérique, un « ultramontain » des Laurentides et un alter ego canadien de Nelson Mandela

Labelle et Camillien - Deux figures du populisme canadien-français
Essai d'histoire politique du Québec
Auteur : Robert Lévesque
Éditeur : VLB, Collection Études québécoises


Montréal, le 22 juin 2009


Le curé Labelle et Camilien Houde
Préfacé par le journaliste et historien André Champagne, cet ouvrage est un amalgame des portraits d’Antoine Labelle et de Camillien Houde écrits distinctement à la fin des années 1970 par Robert Lévesque et Robert Migner. Cet assemblage donne un essai où l’on découvre la vie du curé Labelle qui s’est battu pour que soit construit le « p’tit train du Nord » et que soit ainsi évangélisée toute la région des Laurentides. En deuxième partie, on plonge dans le parcours audacieux de Camillien Houde, fils d'immigrant ruraux ayant grandi dans une « rue si pauvre que la ville ne lui a pas encore donné de nom » (p. 155), Camilien devenu commis de banque, marchand de biscuits, et homme d’affaires qui, une fois politicien, s’est vu ouvrir les portes de l’hôtel de ville de Montréal, à la fin des années 1920, grâce à ses discours convaincants et ses fréquentations.

Cet essai est formidablement clair. Il raconte deux vies en parallèle, l'histoire de deux hommes qui ont profondément aidé la populasse à se sortir de la misère qui lui était dédiée, deux Canayens de souche française ayant réussi à se démarquer malgré les cercles de faveurs fermés à l'anglaise.

Le fond de la politique, plus ça change plus c'est pareil !
Si selon Robert Lévesque « Aucun parti politique n’échappe au populisme. » et si toujours selon l'auteur cette attitude politique n’est plus ce qu’elle était à l’époque du curé Antoine Labelle ou du maire Camillien Houde étant donné qu'il ne s’agit aujourd’hui que d’une entreprise commerciale menée par les médias qui, souvent, créent les événements et entretiennent les scandales, vraiment, à la lecture de ce livre qui se lit comme un roman (et donc sans index à la fin qui aiderait à repérer rapidement certains épisodes si on n'est pas historien), on n'a pas loin à feuilleter pour trouver des rapprochements avec ce qui se passe en politique de nos jours. Pour qui n'a pas l'esprit politique, la trame de fond demeure toujours la même puisque menée par des êtres humains ayant des intérêts concentrés et cherchant à déloger l'autre pour s'installer à sa place. Ce qui change, c'est le contexte qui, à l'époque voyait se construire ici des manufactures et se multiplier les emploiis à l'encontre d'aujourd'hui la mondialisation, l'exode des usines, une crise économique globale, l'omniprésence non plus d'un Dieu à la fois bon et vengeur mais des médias de l'information, et une liberté où tous les coups sont permis et qui écrase toujours autant les autres.

PREMIÈRE PARTIE
LE CURÉ LABELLE,
la colonisation et le chemin de fer - un francophone aux yeux ouverts cherchant à améliorer la vie de ses contemporains
Il a certainement beaucoup fait parler de lui, cet homme qui a vu se fusionner le Haut-Canada anglais au Bas-Canada français et imposer à ce dernier (qui était pourtant premier) de lourdes dettes afin de construire l'Ontario ; il a été du temps où le métis Louis Riel s'est fait condamner parce que le Premier Ministre canadien a choisi de se ranger du côté de la majorité anglophone ; il a fait un voyage inspirant en train dans les Alpes passant de France en Italie par le Mont Cenis ; et puis, il a quitté ce monde au lendemain de la Confédération canadienne. Ceux qui croient que notre monde actuel bouillonne plus que jamais de rebondissements en prendront pour leur rhume en prenant connaissance de tout ce qui nous est parvenu malgré l'absence à l'époque de l'Internet et du numérique.

Premier extrait
Tiré de LABELLE ET CAMILIEN, un extrait lourd de sens, concluant un chapitre de l'histoire qui apparaît étonnant aujourd'hui, l'affaire Guibord, l'histoire de l'Institut canadien et de sa bibliothèque interdite menant à une menace d'excommunication pour les Ultramontains qui la fréquentaient. « Le jeune clergé sait l'heure de la retraite proche pour l'inflexible Bourget et les prélats de sa génération., et s'apprête à dévier de la politique traditionnelle de collaboration probritannique du haut clergé québécois, par faire sien et redéfinir le nationalisme canadien-français qui peut maintenant commencer à prendre appui sur le nouvel État provincial issu de la Confédération de 1867. Les remous de l'affaire Guibord ont engendré chez ces prêtres dont les pères ont été Patriotes une dynamique nouvelle face à la question nationale. » (p. 50)


SECONDE PARTIE
CAMILIEN HOUDE
, le Montréalais princier par ses habits mais populo et rieur d'esprit
Au fil des pages, l'on remarque très vite que les notes en bas de pages le concernant se font nettement plus nombreuses. Camilien Houde est à Montréal et la ville n'est plus territoire vierge depuis longtemps.

Deuxième extrait - le détenu 694 en prison pour avoir exprimé une opinion contraire à celle du gouvernement en place
Pour la Montréalaise qui écrit ces lignes, le choix d'un extrait concernant Camilien Houde, cet homme qui fut maire de Montréal à quatre reprises, des débuts du siècle jusqu'avant Jean Drapeau, s'est avéré infiniment plus difficile. Entre l'histoire de sa vie dans laquelle se décrit Montréal et les étapes de sa vie politique ou encore de son style d'art oratoire ou même encore de ses thèmes ayant pour but de protéger la beauté de sa ville, entre le bossisme à l'américaine et le patronage de la « gang des 23 » en passant par les cocasseries de renversements comme le ministre auquel il manquait un orteil... Finalement, voici, puisque c'est si peu connu que Camilien Houde aurait pu se trouver un ami en Nelson Mandela pour s'être officiellement opposé de manière fracassante et en utilisant les médias « à l'enregistrement national qu'il considère comme une mesure de conscription » (pp. 308-309) : « Ernest Lapointe signa alors, le 4 août 1940, le terrible mandat d'arrestation. Dans les jours qui suivirent, peu d'informations circulèrent sur cet internement, les ondes de la radio étant envahies par la propagande de guerre. À Petawawa, seul parmi les espions, les fascistes et les ressortissants ennemis, le détenu 694, affecté à la coupe du bois pour le chauffage du camp, refoulera toutes les tentatives du gouvernement fédéral de lui arracher une rétractation. L'histoire de Camilien Houde de 1940 à 1944 est celle d'une résistance » (p. 311)... malgré quoi, à son retour il fut réélu à la mairie de Montréal (voir la liste des maires de Montréal en hyperlien au bas de cette page). Par ailleurs, la ville et base militaire de Petawawa se trouvent en Ontario, sur la route Trans-Canadienne.

Troisième extrait - toujours d'actualité dans le monde
« La stratégie de Houde est de faire sortir le vote. Les citoyens des années 1920 ne votaient pas beaucoup ; c'était l'âge d'or de l'apathie politique, c'est-à-dire la distance que les masses perçoivent entre leur bulletin de vote et la capacité réelle d'influemcer le pouvoir. Plus de 45 % d'abstentions au Québec lors de l'élection de 1919 avait persuadé l'organisation Houde (...) (p. 166)

 

L'auteur
Critique dramatique et chroniqueur littéraire, Robert Lévesque a reçu, en 2002, le prix Jules-Fournier du Conseil supérieur de la langue française. Labelle et Camillien. Deux figures du populisme canadien-français est le premier livre qu’il publie chez VLB éditeur. Né à Rimouski en 1944, l’auteur habite aujourd’hui Montréal. Pour Robert Lévesque, il était primordial d’expliquer le populisme en prenant en exemple ces vifs personnages historiques qui en ont prouvé l’efficacité dès la fin du 19e siècle jusqu’au début du 20e siècle.


Hyperliens

Liste des maires de Montréal, depuis le tout premier

Des héros ordfinaires, ouvrage de la magistrate Eva Joly sur la corruption et les abris fiscaux, avec nombreux hyperliens

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